Par Thierry Rochefort, délégué national au travail.
La troisième conférence sociale vient de s’achever. Elle a, cette année, été marquée d’une part par le boycott de la CGT, de FO, de Solidaires, puis de la FSU et d’autre part par la surenchère du MEDEF, exigeant un futur agenda social conforme à ses revendications, en particulier le report du compte pénibilité et la simplification du code du travail.
La plupart des commentateurs ont vu dans ces attitudes des postures et des stratégies syndicales guidées par un souci de positionnement et de court terme. Certains en ont conclu, à tort, qu’il fallait en finir avec ces grands messes et laisser les partenaires sociaux définir seuls leur agenda de travail. Pourtant, ce qui se joue est bien plus profond que des positionnements tactiques. Ce qui est en jeu en effet, c’est la capacité du pays à se moderniser et à faire du dialogue social un levier du redressement productif. Notre postulat est clair : le dialogue social ne s’oppose pas à la compétitivité. Il en est une des conditions de réussite, à l’instar de ce que l’Allemagne et les pays nordiques ont réussi à instituer depuis de nombreuses années.
Or, il y a un paradoxe français à éclaircir. Alors que l’ADN du gouvernement est de type sociale-démocrate, les compromis sont de plus en plus difficiles à trouver, hormis sur des sujets relativement consensuels comme l’apprentissage ou les seniors. Le bilan des deux premières conférences n’a pas été tiré et si aujourd’hui les PSE sont mieux négociés grâce à la loi sécurisation de l’emploi, les accords compétitivité-emploi se comptent sur les doigts d’une main. De son côté, la qualité de vie au travail reste trop souvent un angle mort des politiques d’entreprises, au moment même où la DARES publie les résultats d’une enquête qui montre que l’intensification du travail augmente partout, y compris dans la fonction publique, et que 150 000 personnes par an sont déclarés inaptes à leur poste de travail.
La plupart des commentateurs ont vu dans ces attitudes des postures et des stratégies syndicales guidées par un souci de positionnement et de court terme. Certains en ont conclu, à tort, qu’il fallait en finir avec ces grands messes et laisser les partenaires sociaux définir seuls leur agenda de travail. Pourtant, ce qui se joue est bien plus profond que des positionnements tactiques. Ce qui est en jeu en effet, c’est la capacité du pays à se moderniser et à faire du dialogue social un levier du redressement productif. Notre postulat est clair : le dialogue social ne s’oppose pas à la compétitivité. Il en est une des conditions de réussite, à l’instar de ce que l’Allemagne et les pays nordiques ont réussi à instituer depuis de nombreuses années.
Or, il y a un paradoxe français à éclaircir. Alors que l’ADN du gouvernement est de type sociale-démocrate, les compromis sont de plus en plus difficiles à trouver, hormis sur des sujets relativement consensuels comme l’apprentissage ou les seniors. Le bilan des deux premières conférences n’a pas été tiré et si aujourd’hui les PSE sont mieux négociés grâce à la loi sécurisation de l’emploi, les accords compétitivité-emploi se comptent sur les doigts d’une main. De son côté, la qualité de vie au travail reste trop souvent un angle mort des politiques d’entreprises, au moment même où la DARES publie les résultats d’une enquête qui montre que l’intensification du travail augmente partout, y compris dans la fonction publique, et que 150 000 personnes par an sont déclarés inaptes à leur poste de travail.
La social-démocratie classique semble en panne de méthode, de contenu et d’objectifs clairs. Il ne suffit pas chaque année de multiplier les tables rondes et de saturer l’agenda social pour modifier en profondeur la nature des relations sociales dans un pays profondément marqué par la lutte des classes. La profondeur de la crise, l’affaissement du potentiel productif du pays, la montée inexorable du chômage appellent une action tenace, volontariste fondée sur un diagnostic clair des difficultés.
Six attitudes menacent le dialogue social en France :
Nous devons tenir tous les bouts : le social et l’économique, le court et le long terme, la performance des entreprises et donc l’engagement et la santé des salariés.
Pour cela, nous formulons un certain nombre de propositions qui ont leur cohérence.
- Il faut en finir avec le capitalisme de connivence et de réseaux. De ce point de vue, il faut résolument ouvrir le conseil d’administration ou de surveillance aux représentants des salariés comme le suggérait le rapport Gallois et comme le défend avec vigueur l’ancien patron de Saint Gobain, Jean-Louis Beffa. Il ne s’agit pas ici d’un simple principe démocratique mais d’un souci d’efficacité. Les administrateurs externes qui trustent tous les sièges connaissent mal les entreprises et le seul langage commun qu’ils utilisent est celui du capitalisme financiarisé qui dévitalise les entreprises. Les entreprises françaises ont ainsi appliqué de manière moutonnière les règles de recentrage sur le métier là ou les Chinois et les Allemands continuaient de croire aux vertus du conglomérat. Alstom a failli mourir avec ce type de stratégie. En outre, la présence d’administrateurs salariés assurera de manière efficace le contrôle des aides publiques bien plus que tous les comités ou observatoires mis sur pied par la conférence sociale. Nous proposons que dans les entreprises de plus de 800 salariés, deux administrateurs salariés puissent siéger avec voie délibérative. Nous exigeons en outre la suspension de toutes les aides pour les entreprises qui d’ores et déjà ne respectent pas la loi sur le sujet notamment dans la Grande Distribution
- Il est nécessaire de répondre à la demande légitime des Directions d’entreprises autour de la simplification de certaines procédures sans se tromper de cible ni d’objectifs. Il est hors de question d’accéder aux demandes de réduction des seuils sociaux comme l’envisage le Ministre du Travail. En revanche il est nécessaire de regrouper certaines obligations de négocier. Nous proposons une obligation triennale de négociation, regroupant sous le vocable conditions de travail et populations au travail les négociations sur les RPS, l’égalité professionnelle, les séniors, le handicap, la qualité de vie au travail permettant notamment de réduire l’absentéisme et le nombre de maladies professionnelles. L’ANACT et l’INRS, agences d’Etat, fournissant pour l’occasion une aide méthodologique significative à la négociation.
- L’appareil productif français ne doit pas être tiré par une logique de baisse des salaires mais par la progressive remontée en gamme des produits et des services fondés sur une plus grande valeur ajoutée. Si par exemple l’entreprise Caddy est aujourd’hui au bord de la faillite, la question n’est pas celle du coût du travail, mais d’une insuffisante capacité d’innovation et de diversification des produits. L’initiative de l’UIMM de développer des cadres à temps partagé pour les PME devrait également être encouragée. Depuis longtemps nous plaidons aussi pour que les PME ouvertes à l’export puisse embaucher un ingénieur qualité, un designer un responsable process avec une exonération totale des charges.
Les républicains ne sont pas des étatistes. Dés la loi Waldeck-Rousseau, ils ont compris l’intérêt de reconstituer les corps intermédiaires pour réguler les compromis sociaux issus de la révolution industrielle. Inspirons nous de leurs pensées. A défaut de quoi nous aurons la guerre sociale et le déclin du pays.
Six attitudes menacent le dialogue social en France :
- Le poujadisme patronal qui voit dans chaque syndicaliste un empêcheur de tourner en rond et un obstacle à la bonne marche de l’entreprise
- Une certaine forme d’action syndicale qui confond syndicalisme et politique et voit dans tout conflit social le prélude à la grève générale
- L’absence de perspectives de progrès qui oblige les syndicats à négocier dos au mur des reculs sociaux, ce qui à pour effet d’affaiblir leur légitimité
- La volonté depuis Maastricht de tenir les représentants de la nation hors du champ social, alors que le nécessaire rééquilibrage des forces entre capital et travail des forces suppose une présence active de l’Etat définissant avec les acteurs sociaux des priorités, une hiérarchie des objectifs et des moyens réalistes pour les atteindre
- La remise en cause de l’ordre social et de la hiérarchie des normes qui ne permet plus aux acteurs de négocier sur un terrain juridique solide
- Le développement anarchique d’une bureaucratie administrative qui transforme l’or en plomb et qui fait d’une bonne idée- la prise en compte de la pénibilité- un épouvantail pour tout responsable de PME
Nous devons tenir tous les bouts : le social et l’économique, le court et le long terme, la performance des entreprises et donc l’engagement et la santé des salariés.
Pour cela, nous formulons un certain nombre de propositions qui ont leur cohérence.
- Il faut en finir avec le capitalisme de connivence et de réseaux. De ce point de vue, il faut résolument ouvrir le conseil d’administration ou de surveillance aux représentants des salariés comme le suggérait le rapport Gallois et comme le défend avec vigueur l’ancien patron de Saint Gobain, Jean-Louis Beffa. Il ne s’agit pas ici d’un simple principe démocratique mais d’un souci d’efficacité. Les administrateurs externes qui trustent tous les sièges connaissent mal les entreprises et le seul langage commun qu’ils utilisent est celui du capitalisme financiarisé qui dévitalise les entreprises. Les entreprises françaises ont ainsi appliqué de manière moutonnière les règles de recentrage sur le métier là ou les Chinois et les Allemands continuaient de croire aux vertus du conglomérat. Alstom a failli mourir avec ce type de stratégie. En outre, la présence d’administrateurs salariés assurera de manière efficace le contrôle des aides publiques bien plus que tous les comités ou observatoires mis sur pied par la conférence sociale. Nous proposons que dans les entreprises de plus de 800 salariés, deux administrateurs salariés puissent siéger avec voie délibérative. Nous exigeons en outre la suspension de toutes les aides pour les entreprises qui d’ores et déjà ne respectent pas la loi sur le sujet notamment dans la Grande Distribution
- Il est nécessaire de répondre à la demande légitime des Directions d’entreprises autour de la simplification de certaines procédures sans se tromper de cible ni d’objectifs. Il est hors de question d’accéder aux demandes de réduction des seuils sociaux comme l’envisage le Ministre du Travail. En revanche il est nécessaire de regrouper certaines obligations de négocier. Nous proposons une obligation triennale de négociation, regroupant sous le vocable conditions de travail et populations au travail les négociations sur les RPS, l’égalité professionnelle, les séniors, le handicap, la qualité de vie au travail permettant notamment de réduire l’absentéisme et le nombre de maladies professionnelles. L’ANACT et l’INRS, agences d’Etat, fournissant pour l’occasion une aide méthodologique significative à la négociation.
- L’appareil productif français ne doit pas être tiré par une logique de baisse des salaires mais par la progressive remontée en gamme des produits et des services fondés sur une plus grande valeur ajoutée. Si par exemple l’entreprise Caddy est aujourd’hui au bord de la faillite, la question n’est pas celle du coût du travail, mais d’une insuffisante capacité d’innovation et de diversification des produits. L’initiative de l’UIMM de développer des cadres à temps partagé pour les PME devrait également être encouragée. Depuis longtemps nous plaidons aussi pour que les PME ouvertes à l’export puisse embaucher un ingénieur qualité, un designer un responsable process avec une exonération totale des charges.
Les républicains ne sont pas des étatistes. Dés la loi Waldeck-Rousseau, ils ont compris l’intérêt de reconstituer les corps intermédiaires pour réguler les compromis sociaux issus de la révolution industrielle. Inspirons nous de leurs pensées. A défaut de quoi nous aurons la guerre sociale et le déclin du pays.