Chers amis, chers camarades,
M’a été confiée la lourde tâche de résumer les travaux de la première journée de notre université d’été. Tâche difficile qui ne peut viser à l’exhaustivité, d’autant que je dois être bref.
D’abord l’euro. Nos trois invités de la première table ronde « Transformer l’euro pour sortir de la nasse économique » ont dressé un tableau convergent sur la monnaie unique. Monnaie mal conçue, inadaptée à l’hétérogénéité des systèmes économiques des pays qui composent la zone euro, la monnaie unique était, par sa construction même, un système d’aggravation des divergences. Ce qui est présenté comme une crise de la dette publique est plus profondément, nous a dit Jean-Luc Gréau, une crise de la compétitivité de l’Europe du Sud et de la France par rapport à l’Allemagne. L’euro ne nous a pas protégé de la crise américaine de 2008 et, au contraire, l’ampleur de la récession a été très forte dans la zone, allant jusqu’à une dépression économique en Grèce et au Portugal. Philippe Murer a critiqué vertement les politiques d’austérité, qui loin de soigner le mal supposé - la dette - ne font que l’aggraver en cassant les ressorts de la croissance. Un cercle vicieux est ainsi mis en place où la destruction de l’Etat social en Europe du Sud se révèle vaine si ce n’est contreproductive sur le plan du redressement économique. Et encore, Murer nous a-t-il prévenu que l’Europe était en quasi récession au moment où le reste du monde connaissait encore une certaine croissance économique. Qu’adviendra-t-il à la fin du cycle économique mondial quand la croissance se retournera ? Pour paraphraser Jean-Pierre Chevènement, il est à craindre que nous « sauterons dans le noir ». Murer a détaillé les résultats de son étude sur les « scenarii de dissolution de l’euro » co-produite avec Jacques Sapir. En résumé : la dissolution de l’euro profitera massivement à l’Europe du Sud et à la France, particulièrement dans le cas d’une dissolution contrôlée de l’euro. Le retour d’une certaine inflation en Europe du Sud nécessiterait de la part des gouvernements nationaux un pilotage macro-économique fin. Yves Le Hénaff a confirmé la justesse des grandes lignes de l’étude en évoquant le choc de compétitivité que procurerait une dévaluation pour la France et l’Europe du Sud. Il a également noté la dynamique fondamentale de l’euro qui est d’aggraver les inégalités sociales et les inégalités entre nations, notant avec brio que la hausse des rémunérations outre-Rhin depuis quelques mois était en elle-même un exemple de cette divergence : les Allemands, déjà les mieux payés, le seraient davantage tandis que les pays d’Europe du Sud sont entrés dans un mécanisme de déflation salariale. Une première table ronde qui était certes très technique, mais qui a cherché à aller jusqu’au fond du problème, du moins autant qu’il est possible de le faire en une heure et demie.
M’a été confiée la lourde tâche de résumer les travaux de la première journée de notre université d’été. Tâche difficile qui ne peut viser à l’exhaustivité, d’autant que je dois être bref.
D’abord l’euro. Nos trois invités de la première table ronde « Transformer l’euro pour sortir de la nasse économique » ont dressé un tableau convergent sur la monnaie unique. Monnaie mal conçue, inadaptée à l’hétérogénéité des systèmes économiques des pays qui composent la zone euro, la monnaie unique était, par sa construction même, un système d’aggravation des divergences. Ce qui est présenté comme une crise de la dette publique est plus profondément, nous a dit Jean-Luc Gréau, une crise de la compétitivité de l’Europe du Sud et de la France par rapport à l’Allemagne. L’euro ne nous a pas protégé de la crise américaine de 2008 et, au contraire, l’ampleur de la récession a été très forte dans la zone, allant jusqu’à une dépression économique en Grèce et au Portugal. Philippe Murer a critiqué vertement les politiques d’austérité, qui loin de soigner le mal supposé - la dette - ne font que l’aggraver en cassant les ressorts de la croissance. Un cercle vicieux est ainsi mis en place où la destruction de l’Etat social en Europe du Sud se révèle vaine si ce n’est contreproductive sur le plan du redressement économique. Et encore, Murer nous a-t-il prévenu que l’Europe était en quasi récession au moment où le reste du monde connaissait encore une certaine croissance économique. Qu’adviendra-t-il à la fin du cycle économique mondial quand la croissance se retournera ? Pour paraphraser Jean-Pierre Chevènement, il est à craindre que nous « sauterons dans le noir ». Murer a détaillé les résultats de son étude sur les « scenarii de dissolution de l’euro » co-produite avec Jacques Sapir. En résumé : la dissolution de l’euro profitera massivement à l’Europe du Sud et à la France, particulièrement dans le cas d’une dissolution contrôlée de l’euro. Le retour d’une certaine inflation en Europe du Sud nécessiterait de la part des gouvernements nationaux un pilotage macro-économique fin. Yves Le Hénaff a confirmé la justesse des grandes lignes de l’étude en évoquant le choc de compétitivité que procurerait une dévaluation pour la France et l’Europe du Sud. Il a également noté la dynamique fondamentale de l’euro qui est d’aggraver les inégalités sociales et les inégalités entre nations, notant avec brio que la hausse des rémunérations outre-Rhin depuis quelques mois était en elle-même un exemple de cette divergence : les Allemands, déjà les mieux payés, le seraient davantage tandis que les pays d’Europe du Sud sont entrés dans un mécanisme de déflation salariale. Une première table ronde qui était certes très technique, mais qui a cherché à aller jusqu’au fond du problème, du moins autant qu’il est possible de le faire en une heure et demie.
La seconde table ronde « L’alliance des productifs pour redresser l’industrie française » a vu s’exprimer des points de vue plus divers. Jean-Michel Quatrepoint a d’abord appelé à rassembler les Français autour d’un grand objectif de redressement économique, comme de Gaulle avait pu le faire au début des années 60. Fiscalité, innovation, prise du risque, priorité au travail et à l’industrie : telles sont quelques une des idées de Quatrepoint qui a également encouragé la France à rentrer de plein pied dans ce qu’il appelle l’iconomie. Guillaume Duval est revenu de son côté sur les raisons de la réussite économique allemande, dont il a relativisé en partie l’ampleur et dont il a surtout contesté les origines. En substance : ce ne sont pas les réformes de déréglementation du marché du travail impulsées par Shröder (les lois Hartz) qui sont l’explication de la robustesse économique de l’industrie allemande, mais d’abord la spécialisation industrielle de l’Allemagne sur les machines-outils qui en fait le fournisseur privilégié des pays émergents, et la co-détermination patronat-syndicat qui « moralise » dans une certaine mesure le capitalisme allemand. Christian Hutin a ensuite évoqué sur son expérience parlementaire avec la mission d’enquête sur l’avenir de la sidérurgie, revenant sur l’erreur de la vente de Pechiney et notant la grande convergence de vues des parlementaires sur la question. Une anecdote de Christian semble résumer correctement le fonctionnement de l’Union européenne : une industrie électro-intensive, hésitant entre plusieurs localisations pour ses investissements, se serait ainsi vue proposer par les autorités locales canadiennes la construction d’un barrage, et en France ... un rendez-vous à Bruxelles ! Bref, il y a encore loin de la coupe aux lèvres.
La troisième table ronde « Sortir la France de la dépression » a été marquée par un consensus des participants sur le diagnostic. Pour Eric Dupin, la France est plongée depuis longtemps dans une « dépression nationale ». Une « souffrance sociale polymorphe » s’exprime spontanément chez les Français pour peu qu’on les écoute. Dupin parle d’une « insécurité psychique, mentale des Français face à la modernité », et une « déliaison sociale ». Et il note que le Front national, avec son cocktail d’anti-libéralisme économique et d’anti-libéralisme culturel se retrouve de facto seul à proposer une telle offre politique à des Français en proie au doute par rapport au Progrès et à toutes ses déclinaisons économiques ou médiatiques. Jérôme Sainte-Marie a noté de son côté que la défiance verticale entre le peuple et les élites se double d’une défiance horizontale, entre « semblables ». La thématique du déclin progresse fortement à droite. Gaël Brustier a, de son côté, pointé également cette domination de l’idée de déclin dans le débat politique. Il a mis en garde contre les conséquences électorales de l’importante mobilisation contre le « mariage pour tous ». Pour Sami Naïr enfin, depuis le référendum sur le traité de Maastricht, c’est l’abandon de l’Etat et de la Nation qui serait explicatif de cette situation de déprime nationale.
Enfin les quatre ateliers sur l’éducation, les retraites, la réforme territoriale et l’énergie ont été l’occasion de débats entre militants dont je n’ai pas le temps ici de faire état en détails.
Ce matin, après la brillante intervention de Manuel Valls hier, place au débat politique où s’exprimera une certaine diversité de point de vues. Jérôme Guedj d’abord, député PS et animateur du courant "Maintenant la gauche" au PS, Marc Dolez, député du Nord et membre du Front de gauche et enfin Jean-Pierre Chevènement, notre président d’honneur, sénateur du Territoire de Belfort.
Le débat s’intitule « Relever la France par la voie républicaine » et sera animé par la député Marie-Françoise Bechtel. Ce sera, je n’en doute pas l’occasion pour Jean-Pierre Chevènement d’exposer les grandes lignes de son nouveau livre 1914-2014 : l’Europe sortie de l’histoire ?, qui sortira en octobre et dont je peux d’ores et déjà vous annoncer qu’il fera l’événement.
J’appelle donc à la tribune Marie-Françoise Bechtel, Jérôme Guedj, Marc Dolez et Jean-Pierre Chevènement.
Merci.
La troisième table ronde « Sortir la France de la dépression » a été marquée par un consensus des participants sur le diagnostic. Pour Eric Dupin, la France est plongée depuis longtemps dans une « dépression nationale ». Une « souffrance sociale polymorphe » s’exprime spontanément chez les Français pour peu qu’on les écoute. Dupin parle d’une « insécurité psychique, mentale des Français face à la modernité », et une « déliaison sociale ». Et il note que le Front national, avec son cocktail d’anti-libéralisme économique et d’anti-libéralisme culturel se retrouve de facto seul à proposer une telle offre politique à des Français en proie au doute par rapport au Progrès et à toutes ses déclinaisons économiques ou médiatiques. Jérôme Sainte-Marie a noté de son côté que la défiance verticale entre le peuple et les élites se double d’une défiance horizontale, entre « semblables ». La thématique du déclin progresse fortement à droite. Gaël Brustier a, de son côté, pointé également cette domination de l’idée de déclin dans le débat politique. Il a mis en garde contre les conséquences électorales de l’importante mobilisation contre le « mariage pour tous ». Pour Sami Naïr enfin, depuis le référendum sur le traité de Maastricht, c’est l’abandon de l’Etat et de la Nation qui serait explicatif de cette situation de déprime nationale.
Enfin les quatre ateliers sur l’éducation, les retraites, la réforme territoriale et l’énergie ont été l’occasion de débats entre militants dont je n’ai pas le temps ici de faire état en détails.
Ce matin, après la brillante intervention de Manuel Valls hier, place au débat politique où s’exprimera une certaine diversité de point de vues. Jérôme Guedj d’abord, député PS et animateur du courant "Maintenant la gauche" au PS, Marc Dolez, député du Nord et membre du Front de gauche et enfin Jean-Pierre Chevènement, notre président d’honneur, sénateur du Territoire de Belfort.
Le débat s’intitule « Relever la France par la voie républicaine » et sera animé par la député Marie-Françoise Bechtel. Ce sera, je n’en doute pas l’occasion pour Jean-Pierre Chevènement d’exposer les grandes lignes de son nouveau livre 1914-2014 : l’Europe sortie de l’histoire ?, qui sortira en octobre et dont je peux d’ores et déjà vous annoncer qu’il fera l’événement.
J’appelle donc à la tribune Marie-Françoise Bechtel, Jérôme Guedj, Marc Dolez et Jean-Pierre Chevènement.
Merci.