Parmi les fragments divulgués à propos du très confidentiel traité-transatlantique, l'on sait qu'il s'attaquera en partie à la propriété intellectuelle. Si aucun élément concret n'a en revanche été révélé, plusieurs pistes nous permettent d'appréhender ce que le clair-obscur des négociations nous prépare.
En effet, en matière de propriété intellectuelle littéraire, le rapport Reda, préparé par l'eurodéputée du même nom du parti pirate allemand, peut facilement être vu comme un brouillon de ce qui nous attend. Validé à une large majorité par la commission des affaires juridiques du Parlement européen, les mesures prévues s'attelleront à concilier l'inconciliable, au mépris des spécificités nationales. En tête «l'harmonisation» des règles entre États tout en voulant «renforcer» les exceptions nationales - ce qui est un contresens -, le mépris de la notion de territorialité, le tout au nom du libre-échangisme dérégulé. C'est vers un copyright à l'anglo-saxonne que nous dirige doucement ce rapport inquiétant, copyright qui n'est autre qu'une dépossession inévitable des droits de l'auteur sur son œuvre au profit des producteurs ou éditeurs. Ceux-là mêmes qui engrangent tout le bénéfice de l'œuvre lors de sa diffusion en pouvant la modifier à loisir, comme cela est souvent le cas à Hollywood où il n'est pas rare de voir des acteurs, scénaristes et réalisateurs boycotter leur propre film après qu'il soit passé entre les mains des producteurs.
Comment en aurait-il été autrement quand on sait que l'eurodéputée a largement suivi les lobbies des fournisseurs d'accès et des internautes plutôt que les auteurs pour lesquels elle n'a accordé qu'un temps infime? Or, la Culture ne répond pas, et ne saurait répondre, à une logique d'offre et de demande comme n'importe quel bien marchand ; elle n'est pas la production d'une usine, ni ne se consomme comme un soda ; elle imprègne notre façon d'être et nous distingue anthropologiquement des autres nations.
En effet, en matière de propriété intellectuelle littéraire, le rapport Reda, préparé par l'eurodéputée du même nom du parti pirate allemand, peut facilement être vu comme un brouillon de ce qui nous attend. Validé à une large majorité par la commission des affaires juridiques du Parlement européen, les mesures prévues s'attelleront à concilier l'inconciliable, au mépris des spécificités nationales. En tête «l'harmonisation» des règles entre États tout en voulant «renforcer» les exceptions nationales - ce qui est un contresens -, le mépris de la notion de territorialité, le tout au nom du libre-échangisme dérégulé. C'est vers un copyright à l'anglo-saxonne que nous dirige doucement ce rapport inquiétant, copyright qui n'est autre qu'une dépossession inévitable des droits de l'auteur sur son œuvre au profit des producteurs ou éditeurs. Ceux-là mêmes qui engrangent tout le bénéfice de l'œuvre lors de sa diffusion en pouvant la modifier à loisir, comme cela est souvent le cas à Hollywood où il n'est pas rare de voir des acteurs, scénaristes et réalisateurs boycotter leur propre film après qu'il soit passé entre les mains des producteurs.
Comment en aurait-il été autrement quand on sait que l'eurodéputée a largement suivi les lobbies des fournisseurs d'accès et des internautes plutôt que les auteurs pour lesquels elle n'a accordé qu'un temps infime? Or, la Culture ne répond pas, et ne saurait répondre, à une logique d'offre et de demande comme n'importe quel bien marchand ; elle n'est pas la production d'une usine, ni ne se consomme comme un soda ; elle imprègne notre façon d'être et nous distingue anthropologiquement des autres nations.
Cela ne nuit pas à son potentiel économique, au contraire même. En France, la culture contribue pour 3,2% à la richesse nationale (donc une valeur ajoutée de 57,8 milliards), soit sept fois plus que le secteur automobile! Sans compter les plus de 600 000 emplois que les branches culturelles recouvrent. L'étude faite par l'Inspection Générale des Finances en 2013 démystifie donc largement les préjugés autour d'une politique gaspilleuse. L'exception culturelle rapporte ainsi bien plus qu'elle ne coûte, dans la mesure où l'État n'y investit «que» 13,9 milliards d'euros. Pourtant, il faut savoir que cette exception culturelle ne vaut rien sur le plan juridique international. En effet, si nos gouvernants s'en prévalent pour calmer mollement les cris d'alertes qui s'élèvent, ils ne pourraient strictement rien faire si le traité-transatlantique venait à s'appliquer, et toute politique préférentielle serait prohibée par les stipulations du traité, car jugés «discriminatoires» et faussant donc le jeu de la libre-concurrence.
De la même manière, l'on peut augurer le même sort pour la propriété industrielle, notamment en matière de brevet. Le brevet unique pour toute l'Union Européenne s'est depuis longtemps révélé comme une vaste usine à gaz ; à savoir que pour être valable, aucune de ses composantes ne doit souffrir d'une déposition similaire dans l'un des pays membres, soit une condition des plus ardues à remplir! Qu'en sera-t-il avec le traité-transatlantique? Les brevets étasuniens prévaudront-ils ou bénéficieront-ils d'une meilleure protection due à l'hégémonie économique des États-Unis? De même, en droit des marques, verra-t-on les futurs tribunaux d'arbitrages trancher les conflits sur tel nom comme cela s'est vu pour l'iPhone brésilien qui a dû changer de nom au profit de la marque à la pomme, bien que plus ancien? Loin d'accomplir le souhait des fédéralistes appelants à une véritable Europe supranationale - donc souveraine -, ceux-ci s'enferment définitivement dans leur contradiction en choisissant la logique de marché et les incertitudes de la mondialisation. Comment ne pourraient-ils se douter que l'hégémonie économique et politique des États-Unis ne jouerait pas en leur faveur en laissant le marché devenir le seul régulateur? Nous ne pouvons attendre de voir l'élite européiste se cacher sous les jupes des traités pour prendre conscience de la gravité des enjeux que recouvrent ces négociations. Le droit n'a pas vocation à être colonisé par la marchandisation, tout comme la Culture. Tous deux obéissent à des principes qui se situent au-delà des contingences économiques et financières, surtout quand elles sont contraires à nos traditions juridiques. Nous ne pouvons maquereauter notre richesse culturelle au nom d'un mondialisme dogmatique, surtout à l'heure où elle n'a jamais autant attiré de visiteurs.
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Source : FigaroVox
De la même manière, l'on peut augurer le même sort pour la propriété industrielle, notamment en matière de brevet. Le brevet unique pour toute l'Union Européenne s'est depuis longtemps révélé comme une vaste usine à gaz ; à savoir que pour être valable, aucune de ses composantes ne doit souffrir d'une déposition similaire dans l'un des pays membres, soit une condition des plus ardues à remplir! Qu'en sera-t-il avec le traité-transatlantique? Les brevets étasuniens prévaudront-ils ou bénéficieront-ils d'une meilleure protection due à l'hégémonie économique des États-Unis? De même, en droit des marques, verra-t-on les futurs tribunaux d'arbitrages trancher les conflits sur tel nom comme cela s'est vu pour l'iPhone brésilien qui a dû changer de nom au profit de la marque à la pomme, bien que plus ancien? Loin d'accomplir le souhait des fédéralistes appelants à une véritable Europe supranationale - donc souveraine -, ceux-ci s'enferment définitivement dans leur contradiction en choisissant la logique de marché et les incertitudes de la mondialisation. Comment ne pourraient-ils se douter que l'hégémonie économique et politique des États-Unis ne jouerait pas en leur faveur en laissant le marché devenir le seul régulateur? Nous ne pouvons attendre de voir l'élite européiste se cacher sous les jupes des traités pour prendre conscience de la gravité des enjeux que recouvrent ces négociations. Le droit n'a pas vocation à être colonisé par la marchandisation, tout comme la Culture. Tous deux obéissent à des principes qui se situent au-delà des contingences économiques et financières, surtout quand elles sont contraires à nos traditions juridiques. Nous ne pouvons maquereauter notre richesse culturelle au nom d'un mondialisme dogmatique, surtout à l'heure où elle n'a jamais autant attiré de visiteurs.
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Source : FigaroVox