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Publié le Lundi 5 Septembre 2011

Pour une politique culturelle ambitieuse, mais non ruineuse


Mots-clés : culture

Tribune d'Olivier Amiel, délégué national du Mouvement Républicain et Citoyen à la culture, parue sur le site du quotidien Les Echos, le 1er septembre 2011


Pour une politique culturelle ambitieuse, mais non ruineuse
Certes, les vœux restés pieux de Nicolas Sarkozy en matière de démocratisation de la culture et de développement des industries culturelles nationales rendent nécessaire un changement de cap en 2012. De plus, il existe bien des précédents bénéfiques de hausses spectaculaires des finances gouvernementales allouées à la culture : le travail initiatique d’André Malraux en 1959, et le doublement du budget sous Jack Lang en 1981.

Cependant, la fragilité actuelle des finances publiques françaises dans un contexte européen et mondial extrêmement difficile, appelle à plus de prudence et d’ingéniosité afin de proposer une politique culturelle ambitieuse, mais non ruineuse.

Il est tout d’abord nécessaire de permettre un réel accès à la culture pour tous. Le « relativisme culturel », cette assimilation de trop nombreuses formes de loisirs et de divertissements à de l'Art tend à discréditer l'ensemble, et surtout à cloisonner les publics : on laisse les publics traditionnels profiter des expressions artistiques plus classiques… De ce fait, la question de la gratuité des musées et des tarifs attractifs pour les spectacles subventionnés est tronquée tant que l'accès par l'initiation et le goût n'est pas réellement pris en compte par la puissance publique. Le système éducatif national doit être réellement associé à la politique culturelle afin que celle-ci ne soit pas un facteur aggravant de la reproduction sociale.

En plus d'être une industrie et souvent un art, l’audiovisuel est toujours un vecteur de projection et de transmission civilisatrices pour les peuples et les nations. Or, force est de constater que le modèle hollywoodien tend à une hégémonie impérialiste qu'il est nécessaire de combattre. Il s'agissait de l'objet de l'Exception culturelle française, reprise depuis avec succès par nos partenaires européens dans le cadre de la Diversité culturelle. Cette défense n'a de raison d'être que s'il s'agit d'une politique altruiste en la matière : certes nous devons défendre (et notamment dans le cadre de l'OMC) le droit à promouvoir notre propre secteur audiovisuel en dérogeant aux principes libre-marchands, mais nous devons également permettre aux Etats en voie de développement d'atteindre ce but. La Diversité culturelle promue par l'Unesco vise à stopper une certaine globalisation culturelle de l'image, mais également à dépasser notre ethno-centrisme par une grande politique audiovisuelle ouverte.

La crise de l'intermittence du spectacle qui dure depuis 2002 doit enfin être résolue. Abandonner ce système de cotisation et de répartition serait une erreur, car il permet à la France d'avoir un secteur artistique florissant. Le laisser en l'état, malgré les nouveaux calculs, serait inconscient tant le déficit de l'Unedic reste important. Il conviendrait surtout d'opérer un audit complet et sérieux sur l'ensemble des filières bénéficiant de l'intermittence : spectacle vivant, cinéma et audiovisuel, avec une attention particulière à ce dernier compte tenu des abus connus de tous dans les entreprises de production télévisuelle. Le système est bon et viable s'il bénéficie seulement à ceux qui en ont réellement besoin.

Enfin, il serait opportun de prévoir une ouverture prudente de discussions sur l'inaliénabilité des collections publiques. Relancée par le rapport « Valorisation du patrimoine » remis au Premier Ministre en mars dernier par deux économistes, l'aliénabilité des collections publiques doit être très prudemment discutée. En effet, il est rarement bon de mêler conservation du patrimoine et secteur marchand, sauf à prévoir d'importants garde-fous. C'est justement ce que prévoit notre droit qui n'interdit pas l'aliénation d'éléments du domaine public culturel, mais sous des conditions très strictes, avec notamment des passages devant des comités scientifiques. Vouloir augmenter ces ouvertures est dangereux et inutile. Le Rapport de Jacques Rigaud en 2008 allait d'ailleurs dans ce sens. Cependant, suite aux différends concernant la restitution de la dépouille de Saartjie Baartman (dite « Vénus Hottentote ») à l'Afrique-du-Sud et de têtes maories à la Nouvelle-Zélande qui ont nécessité à chaque fois une loi spéciale, la considération de restes humains comme « choses » inaliénables doit être remise en cause quand ils méritent une sépulture digne. Compte tenu de l'évolution des mentalités, un débat serein est nécessaire à ce sujet.

Ces quatre premières pistes prouvent qu’une politique culturelle républicaine et responsable est possible pour la France.

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Source : Les Echos

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