Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le mouvement républicain et citoyen est attaché à toute entreprise ayant pour objectif le redressement économique de notre pays. Tout découle en effet de cette impérieuse nécessité, depuis la prospérité retrouvée et, avec elle, la confiance dans l’avenir, jusqu’à, nous le savons tous hélas aujourd’hui, la cohésion autour des valeurs républicaines.
La réforme de l’État dans sa dimension territoriale peut-elle contribuer à ce redressement ? C’est au fond tout l’enjeu de ce premier chapitre que vous nous conviez à ouvrir en le mettant sous le signe, nous l’avons bien compris, du renouveau économique. Encore cet esprit de la réforme doit-il aller avec la lettre. Vous admettrez à cet égard, monsieur le ministre, qu’il faut une certaine foi – et même une foi certaine – pour donner une adhésion a priori à une réforme qui définit un contenant sans contenu, des périmètres sans les compétences qui vont avec et qui fait l’impasse sur la question, pourtant cruciale, de la gouvernance des régions qui, redessinées, devraient être aussi repensées.
La réforme de l’État dans sa dimension territoriale peut-elle contribuer à ce redressement ? C’est au fond tout l’enjeu de ce premier chapitre que vous nous conviez à ouvrir en le mettant sous le signe, nous l’avons bien compris, du renouveau économique. Encore cet esprit de la réforme doit-il aller avec la lettre. Vous admettrez à cet égard, monsieur le ministre, qu’il faut une certaine foi – et même une foi certaine – pour donner une adhésion a priori à une réforme qui définit un contenant sans contenu, des périmètres sans les compétences qui vont avec et qui fait l’impasse sur la question, pourtant cruciale, de la gouvernance des régions qui, redessinées, devraient être aussi repensées.
Nous prenons certes acte, monsieur le ministre, de ce que le Gouvernement n’entend pas réformer pour le plaisir de réformer, bouger pour bouger, comme nous l’avons connu dans un passé récent, dont la devise aurait pu être : « Je change, donc je suis ! » Mais, si l’objectif est légitime, le projet ici présenté prend-il les meilleures voies pour y parvenir ? J’exposerai sans fard nos doutes et nos interrogations.
Première interrogation : la taille des régions est-elle bien l’alpha et l’oméga de la réussite économique ? Nous avons entendu nombre d’idées reçues sur cette question. Or, force est de le reconnaître, la recherche d’un optimum régional par la superficie et la démographie n’emporte pas, tant s’en faut, l’adhésion d’une majorité de chercheurs. Elle se heurte même au bon sens lorsque l’on mesure l’écart entre petites régions riches et grandes régions pauvres, tel l’écart caricatural entre le Val d’Aoste et la Sicile, le premier dix fois plus riche que la seconde avec un territoire dix fois plus petit !
C’est donc sur le fondement d’un enjeu quelque peu mythique que sont définis dans la loi qui nous est présentée des périmètres contestables, mal vécus et même parfois absurdes, soit par l’excès de la taille – je pense à l’Aquitaine, mariée sur le tard avec le Limousin et le Poitou-Charentes –, soit au contraire par le maintien d’une taille réduite, d’ailleurs en contradiction avec l’enjeu de régions agrandies, comme dans le cas de la Bretagne et des Pays de la Loire. Des périmètres issus également d’un rattachement incertain, comme c’est le cas pour la Franche-Comté ou encore pour la Picardie dont je suis l’élue, deux exemples qui illustrent en réalité l’impossibilité de tout rattachement cohérent par bloc régional.
Devant une carte qui contient trop de mauvaises solutions, ne fallait-il pas réinterroger la méthode ? Oubliant les mariages forcés, il était possible de faire le choix d’une interrégionalité, dotée des procédures appropriées, résolvant la question des particularismes, mais surtout permettant une synergie qui aurait été le cadre dans lequel pouvaient être menés de grands projets d’aménagement du territoire et de développement économique. Les universités en donnent l’exemple, telles celles de la Bretagne et des Pays de la Loire. Pourquoi ne pas suivre cet excellent modèle plutôt que de s’enfermer dans le carcan rigide qui pourrait mener, à travers un désamour confirmé, à l’exercice d’un droit d’option incertain et coûteux ?
Deuxième interrogation : quel sera demain le visage de cette créature nouvelle, une région chargée de compétences supplémentaires qui, ajoutées aux compétences actuelles, accroîtront le fardeau gestionnaire alors que l’on veut faire de la même région le pilote du décollage économique ? Et comment concilier avec un visage démocratique l’élection sur des territoires encore plus vastes qu’aujourd’hui, alors que la région peine déjà souvent à assumer le statut réel d’une collectivité territoriale suffisamment identifiée par la population ?
On le voit bien, monsieur le ministre, si l’on veut assurer tant la démocratie que l’efficacité, l’échelon régional demande à être profondément repensé. À défaut d’une conception ferme de ce que sera demain la région nouvelle, nous sommes peu convaincus, à ce stade, de la pertinence de la réforme proposée.
Nous avons bien noté que vous avez refusé d’ouvrir la porte à une identité régionale toute empreinte d’un entre-soi passéiste. Rien ne serait en effet plus funeste que ce repliement en apparence si loin de l’ouverture des frontières, en réalité si adéquat à la mondialisation par le rejet de l’État-nation que l’un et l’autre impliquent.
Craignons cependant que n’entre par la fenêtre la boulimie régionaliste toujours à la recherche de ce que Jean Jaurès appelait ces fiefs locaux que se sont entaillés des notables locaux dans la souveraineté nationale, laissant le soin à l’État de gérer la pénurie territoriale au détriment de cette cohésion nationale qui est l’un des grands atouts historiques de la France, à l’intérieur comme à l’extérieur.
Première interrogation : la taille des régions est-elle bien l’alpha et l’oméga de la réussite économique ? Nous avons entendu nombre d’idées reçues sur cette question. Or, force est de le reconnaître, la recherche d’un optimum régional par la superficie et la démographie n’emporte pas, tant s’en faut, l’adhésion d’une majorité de chercheurs. Elle se heurte même au bon sens lorsque l’on mesure l’écart entre petites régions riches et grandes régions pauvres, tel l’écart caricatural entre le Val d’Aoste et la Sicile, le premier dix fois plus riche que la seconde avec un territoire dix fois plus petit !
C’est donc sur le fondement d’un enjeu quelque peu mythique que sont définis dans la loi qui nous est présentée des périmètres contestables, mal vécus et même parfois absurdes, soit par l’excès de la taille – je pense à l’Aquitaine, mariée sur le tard avec le Limousin et le Poitou-Charentes –, soit au contraire par le maintien d’une taille réduite, d’ailleurs en contradiction avec l’enjeu de régions agrandies, comme dans le cas de la Bretagne et des Pays de la Loire. Des périmètres issus également d’un rattachement incertain, comme c’est le cas pour la Franche-Comté ou encore pour la Picardie dont je suis l’élue, deux exemples qui illustrent en réalité l’impossibilité de tout rattachement cohérent par bloc régional.
Devant une carte qui contient trop de mauvaises solutions, ne fallait-il pas réinterroger la méthode ? Oubliant les mariages forcés, il était possible de faire le choix d’une interrégionalité, dotée des procédures appropriées, résolvant la question des particularismes, mais surtout permettant une synergie qui aurait été le cadre dans lequel pouvaient être menés de grands projets d’aménagement du territoire et de développement économique. Les universités en donnent l’exemple, telles celles de la Bretagne et des Pays de la Loire. Pourquoi ne pas suivre cet excellent modèle plutôt que de s’enfermer dans le carcan rigide qui pourrait mener, à travers un désamour confirmé, à l’exercice d’un droit d’option incertain et coûteux ?
Deuxième interrogation : quel sera demain le visage de cette créature nouvelle, une région chargée de compétences supplémentaires qui, ajoutées aux compétences actuelles, accroîtront le fardeau gestionnaire alors que l’on veut faire de la même région le pilote du décollage économique ? Et comment concilier avec un visage démocratique l’élection sur des territoires encore plus vastes qu’aujourd’hui, alors que la région peine déjà souvent à assumer le statut réel d’une collectivité territoriale suffisamment identifiée par la population ?
On le voit bien, monsieur le ministre, si l’on veut assurer tant la démocratie que l’efficacité, l’échelon régional demande à être profondément repensé. À défaut d’une conception ferme de ce que sera demain la région nouvelle, nous sommes peu convaincus, à ce stade, de la pertinence de la réforme proposée.
Nous avons bien noté que vous avez refusé d’ouvrir la porte à une identité régionale toute empreinte d’un entre-soi passéiste. Rien ne serait en effet plus funeste que ce repliement en apparence si loin de l’ouverture des frontières, en réalité si adéquat à la mondialisation par le rejet de l’État-nation que l’un et l’autre impliquent.
Craignons cependant que n’entre par la fenêtre la boulimie régionaliste toujours à la recherche de ce que Jean Jaurès appelait ces fiefs locaux que se sont entaillés des notables locaux dans la souveraineté nationale, laissant le soin à l’État de gérer la pénurie territoriale au détriment de cette cohésion nationale qui est l’un des grands atouts historiques de la France, à l’intérieur comme à l’extérieur.