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Publié le Lundi 13 Octobre 2014 par

Gaz de schiste: le débat interdit


Mots-clés : recherche, énergie

Tribune de Jean-Luc Laurent, président du MRC et député du Val-de-Marne, parue sur le site Huffington Post, dimanche 12 octobre 2014.


Gaz de schiste: le débat interdit
Le retour politique de l'ancien Président de la République et le débat parlementaire sur le projet de loi « transition énergétique » ont fait réapparaitre le débat interdit sur les gaz de schiste. Avec le lourd parrainage de Nicolas Sarkozy et Monsieur le député Julien Aubert, porte-parole tonitruant du groupe UMP sur l'énergie, il faut toutefois un peu d'audace pour vouloir ouvrir le débat à gauche.

Ce débat a été verrouillé à double tour en 2011 par l'annulation des permis, le soutien unanime aux mobilisations locales et finalement le vote de la loi qui interdit l'exploitation comme l'exploration. La loi de 13 juillet 2011, permise par l'alliance contre-nature des "cultivateurs productifs" de Seine-et-Marne de Christian Jacob et des "agriculteurs paysans" de José Bové, frappe également d'interdit la technique de la fracturation hydraulique.

Depuis, à part les professionnels des hydrocarbures, seules quelques voix ont osé relever l'absurdité de cette politique de la peur si bien mise en scène dans le documentaire américain de propagande «Gasland»

Il est indispensable de connaître le potentiel du sous-sol français. Les promoteurs professionnels des gaz de schistes et certains économistes ont, par réaction et pour se faire entendre dans l'espace médiatique, survendu la « révolution » que représenteraient les gaz de schiste. Gardons la tête froide: les Etats-Unis ont connu une ruée vers le gaz de schiste et le marché mondial de l'énergie a été bouleversé. L'impact n'est pas forcément durable et, surtout, il ne sera reproductible à l'identique en France dans un contexte très différent (coûts plus élevés, contrôle public, protection de l'environnement supérieure...). Au pays de Descartes, le choix irrationnel de l'ignorance est la pire des politiques. La rationalité consiste à faire un calcul coûts/avantages sérieux, sans faire semblant de croire qu'il existe des énergies neutres ou propres et en se souvenant que la « vertueuse » transition énergétique allemande fonctionne grâce au charbon américain et aux centrales thermiques polonaises.

En 2011, l'opération de propagande a permis de diaboliser la fracturation hydraulique en s'appuyant sur les pires dérives de l'expérience américaine. Là encore, le contexte est différent : l'industrie du forage américaine n'existe pas en France, le droit minier est public...il n'y aura pas en France de ruée sur les gaz de schiste et il faut évaluer sérieusement les conséquences environnementales de la fracturation hydraulique. Il faut faire en sorte de minimiser cet impact par la recherche et l'innovation : nos industriels expérimentés en sont capables. Si cela s'avère nécessaire, il faut développer des alternatives à la fracturation.

Certains disent que les gaz de schiste seraient incompatibles avec la stratégie de transition énergétique. La décarbonation de l'économie française est un objectif de long terme, pour quelques décennies encore nous importerons du gaz. Le gaz de schiste pourrait simplement se substituer avec le développement d'une chaine de production, de création de valeur ajoutée et d'emplois en France. Le gaz de schiste pourrait faire baisser la facture énergétique extérieure, réduire notre dépendance et renforcer notre souveraineté. La gauche a fait sienne l'impératif de redressement productif et il est incompréhensible d'écarter a priori la relocalisation d'une partie de notre approvisionnement énergétique.

La gauche qui, jusqu'au coup d'arrêt de mars dernier, a pris progressivement le contrôle de l'ensemble des institutions locales maitrise les enjeux du développement local. Regarder la carte potentielle du gaz de schiste, c'est parcourir des espaces souvent périphériques qui sont à l'écart des dynamiques métropolitaines. Ces territoires se battent souvent pour le maintien des emplois locaux, des services publics, de la dernière classe de l'école du village. Economiquement, ces territoires se sont spécialisés dans une agriculture alternative et du tourisme vert. Ce modèle est-il totalement satisfaisant ? Tout va-t-il si bien dans ces territoires ? Le sud Seine-et-Marne est-il condamné à vivre dans l'ombre de la métropole du Grand Paris ? Ce modèle n'assure-t-il pas la domination définitive des espaces urbains et des urbains ? Ces modèles de développement local ne pourraient-ils pas être enrichis par un projet industriel énergétique bien intégré et dont l'impact paysager n'aurait rien à voir avec les images effrayantes de « Gasland ». La force d'un territoire repose sur la diversité de son économie et de son marché du travail. Aujourd'hui, la création en Ardèche d'emplois d'ingénieurs, de techniciens et d'ouvriers est tout simplement frappée d'un interdit législatif.

Trop de verbes dans cette tribune sont conjugués au conditionnel. Délivrons des permis d'exploration. Appliquons l'article 2 de la loi de 2011 qui prévoit une évaluation sérieuse de la fracturation hydraulique et le soutien à la recherche d'alternatives. Révisons notre droit minier pour que les territoires et leurs habitants soient associés aux projets, et puissent les vivre comme une chance et non comme une calamité. Si l'on veut avoir une chance d'exploiter cette ressource dans les années 2020, ouvrons le débat maintenant !


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Source : Huffington Post

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Jean-Luc Laurent
Président du Mouvement Républicain et Citoyen. En savoir plus sur cet auteur



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