A l’approche de l’élection présidentielle française, et alors qu’il apparaît évident que le dernier plan européen d’aide à la Grèce ne suffira pas, les candidats et commentateurs politiques font assaut de vertu pour complaire aux « marchés » et aux agences de notation.
Le maintien du « triple A » pour la France semble ainsi devenu l’objectif prioritaire des candidats « sérieux », chacun guettant chez l’autre le faux pas synonyme de laxisme budgétaire.
S’il n’est guère contestable qu’un réflexe keynésien sur le plan de la dépense publique est devenu quelque peu anachronique dans un univers libre-échangiste (l’excès de dépense profitant avant tout à l’industrie étrangère), il n’en demeure pas moins que les grandes variables du problème sont superbement ignorées pour le moment.
Le maintien du « triple A » pour la France semble ainsi devenu l’objectif prioritaire des candidats « sérieux », chacun guettant chez l’autre le faux pas synonyme de laxisme budgétaire.
S’il n’est guère contestable qu’un réflexe keynésien sur le plan de la dépense publique est devenu quelque peu anachronique dans un univers libre-échangiste (l’excès de dépense profitant avant tout à l’industrie étrangère), il n’en demeure pas moins que les grandes variables du problème sont superbement ignorées pour le moment.
La faute à l'Allemagne et aux Etats-Unis ?
Premièrement, quelles sont les causes de la dette publique française ? D’abord la gestion catastrophique de la réunification allemande dans les années 90 (la dette publique passe alors de 32 à 57% du PIB entre 1992 et 1997), soit une erreur de politique économique majeure avec la délétère politique dite du « franc fort ». Ensuite, l’effondrement des recettes fiscales (et non l’envolée des dépenses budgétaires) consécutives à la crise financière américaine en 2008 (la dette publique passe de 63 à 81% du PIB entre 2007 et 2010), soit l’encaissement difficile d’un choc extérieur venu d’outre Atlantique. La moitié environ de notre dette publique provient de ces deux chocs.
Un euro plus faible
Deuxièmement, comment revenir à une situation plus favorable en termes de déficit public ? En accroissant les recettes ! D’abord, en retrouvant un niveau de croissance bien supérieur, ce qui suppose avant tout un euro plus faible par rapport au dollar et au yuan. Il s’agit là d’une condition sine qua non au rétablissement des comptes publics. Ensuite, en reconstituant une base productive qui passe nécessairement par la priorité à l’investissement dans ses trois composantes : investissement productif des entreprises, investissement public dans les infrastructures et investissement des ménages dans la construction résidentielle. C’est l’élargissement de notre capacité de production qui permettra la consolidation et l’accroissement de nos recettes fiscales. A ce stade du raisonnement, il convient de souligner que le réalisme fiscal impose de s’appuyer sur les impôts à fort rendement (en particulier la TVA) et de restructurer ceux dont le rendement a décru de manière catastrophique (l’impôt sur les sociétés, essentiellement pour les grandes entreprises).
Il faudra également d’une manière ou d’une autre cesser de tolérer un régime de dumping fiscal en Europe, la situation de l’Irlande apparaissant tout à fait extravagante. Plus généralement, la mise en place d’eurobonds qui signifierait en creux une mutualisation partielle des dettes publiques de la zone euro devrait s’accompagner de la fin des politiques de fonds structurels européens très coûteuses pour les finances publiques de pays comme la France et inefficaces à créer ex nihilo une réalité productive comme les montrent les exemples grecs, espagnols ou portugais.
Il faudra également d’une manière ou d’une autre cesser de tolérer un régime de dumping fiscal en Europe, la situation de l’Irlande apparaissant tout à fait extravagante. Plus généralement, la mise en place d’eurobonds qui signifierait en creux une mutualisation partielle des dettes publiques de la zone euro devrait s’accompagner de la fin des politiques de fonds structurels européens très coûteuses pour les finances publiques de pays comme la France et inefficaces à créer ex nihilo une réalité productive comme les montrent les exemples grecs, espagnols ou portugais.
Renationaliser la dette
Troisièmement, comment desserrer l’étau que font peser sur la politique économique française les marchés financiers et les agences de notation ? Non pas en créant une « agence de notation européenne » comme le croient des esprits naïfs ou simplement déconnectés de toute réalité un tant soit peu sérieuse. Mais en renationalisant la dette publique française, objectif atteignable du fait de l’abondante épargne des ménages français. Notre dette publique est en effet désormais détenue à 70 % par l’étranger contre seulement 27 % il y a dix ans.
Comment faire ? En proposant des OAT (Obligations assimilables du Trésor) « perpétuelles » (ou d’une durée de 100 ans) que les ménages pourraient souscrire directement auprès de la Banque postale, des mutualistes et des agents comptables du Trésor (autrement dit les centres d’impôt), voire des banques (mais sans commissions). En proposant un taux élevé (par exemple 4,5 %) et en n’oubliant pas que 31 % des intérêts sont récupérés par le trésor public sous forme de CSG et de prélèvement libératoire, on aurait en gros le taux actuel des OAT proposées… aux marchés financiers, mais sans aucun des inconvénients liés (amateurisme des agences de notations, fébrilité des opérateurs des marchés, etc.).
La dette publique n’est pas affaire de contrat : la « règle d’or » n’ayant pas plus de valeur que le plafond de la dette aux Etats-Unis, ou que les promesses de « perroquets » répétant furieusement « 3 %, 3 % » comme si la répétition d’un vœu le rendait réel. Les suggestions proposées ci-dessus finiront par s’imposer par la force des événements. Ou bien nous sortirons du cadre démocratique, désormais insupportable pour nos nouveaux maîtres de la finance, et la situation prendra des allures qu’il faudra bien qualifier de coup d’Etat.
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(*) cet article s’inspire largement des interventions de MM. Jean-Luc Gréau et Jean-Michel Quatrepoint au cours du colloque « Comment faire face à l’explosion de la dette publique ? » tenu par la Fondation Res Publica le 14 mars 2011 (actes en cours de publication sur le site Internet de la Fondation : www.fondation-res-publica.org).
Source : Atlantico.fr
Comment faire ? En proposant des OAT (Obligations assimilables du Trésor) « perpétuelles » (ou d’une durée de 100 ans) que les ménages pourraient souscrire directement auprès de la Banque postale, des mutualistes et des agents comptables du Trésor (autrement dit les centres d’impôt), voire des banques (mais sans commissions). En proposant un taux élevé (par exemple 4,5 %) et en n’oubliant pas que 31 % des intérêts sont récupérés par le trésor public sous forme de CSG et de prélèvement libératoire, on aurait en gros le taux actuel des OAT proposées… aux marchés financiers, mais sans aucun des inconvénients liés (amateurisme des agences de notations, fébrilité des opérateurs des marchés, etc.).
La dette publique n’est pas affaire de contrat : la « règle d’or » n’ayant pas plus de valeur que le plafond de la dette aux Etats-Unis, ou que les promesses de « perroquets » répétant furieusement « 3 %, 3 % » comme si la répétition d’un vœu le rendait réel. Les suggestions proposées ci-dessus finiront par s’imposer par la force des événements. Ou bien nous sortirons du cadre démocratique, désormais insupportable pour nos nouveaux maîtres de la finance, et la situation prendra des allures qu’il faudra bien qualifier de coup d’Etat.
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(*) cet article s’inspire largement des interventions de MM. Jean-Luc Gréau et Jean-Michel Quatrepoint au cours du colloque « Comment faire face à l’explosion de la dette publique ? » tenu par la Fondation Res Publica le 14 mars 2011 (actes en cours de publication sur le site Internet de la Fondation : www.fondation-res-publica.org).
Source : Atlantico.fr